L’activité des MDPH est en pleine effervescence pour préparer au mieux les réponses aux demandes de scolarisation pour la rentrée 2022/2023. Cependant, cette préparation de la rentrée laisse aux équipes un goût amer face à l’absence de réponses et de décisions quant aux décisions à prendre et aux moyens nécessaires pour une rentrée scolaire réussie pour les enfants en situation de handicap.
Les MDPH sont engagées de longue date dans le projet de l’école inclusive, en témoigne le nombre croissant d’enfants en situation de handicap scolarisés. Nous sommes pleinement engagés dans ce projet au côté des familles, des enfants, des équipes éducatives et de l’Éducation Nationale, afin de promouvoir et de respecter les projets de scolarisation et leurs conditions de mise en œuvre.
Il n’en demeure pas moins que si l’objectif est partagé, les difficultés le sont sans doute moins, conduisant ainsi à un renvoi de responsabilités entre partenaires et à la mise en péril de la scolarisation de certains enfants.
Il en est ainsi du nombre croissant d’attribution d’aides humaines, les MDPH reçoivent des demandes en hausse continue et doivent statuer sur des documents fournis et complétés par les familles et les équipes de l’Éducation Nationale. L’évaluation, renforcée par les éléments adressés par les enseignants référents, conduit le plus souvent à attribuer cette aide humaine, les éléments du dossier étant concordants et légitimes. Le nombre d’élèves accompagnés ne fait que croître d’année en année, y compris sur les territoires t ruraux qui ne font pourtant que perdre des élèves.
Or l’Éducation Nationale, chargée de la mise en œuvre des décisions des commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, nous semble être en difficulté. Nombreuses sont les MDPH qui assurent pour l’Éducation Nationale, la formation des enseignants-référents, nombreuses sont celles qui, en dépit de l’absence d’effectifs de l’Éducation Nationale au sein du GIP MDPH, tentent de répondre aux demandes des familles en préparation de la rentrée scolaire. Enfin, nombreuses sont les équipes d’évaluation qui constatent chaque jour que le défaut d’accessibilité de l’école, des contenus pédagogiques, du matériel lui-même font peser sur les équipes éducatives, les familles, les enfants et tout leur entourage la nécessité de recourir à des Accompagnants d’Élèves en Situation de Handicap (AESH) pour ne pas freiner ou empêcher une scolarisation.
L’accès à une scolarisation accessible devrait en première intention être de la responsabilité et du ressort de l’école et nécessite des moyens. Cette ambition ne devrait pas reposer sur des professionnels engagés, des équipes à bout de souffle ou des familles qui donnent tout ce qu’elles ont pour garantir l’accès à la scolarisation.
Ce manque d’accessibilité globale fait peser sur les MDPH des attentes considérables sur la réussite, le maintien ou l’accès à la scolarisation. On demande aux équipes d’évaluation de la MDPH d’endosser, par défaut, un rôle de régulateur des demandes parce que l’ensemble du dispositif n’est pas adapté.
La récente mission de l’Inspection Générale des Finances et de l’Inspection Générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche a porté sur l’aide humaine tant sur le volet prescriptions des MDPH que sur le volet des prévisions budgétaires. Une vingtaine de MDPH ont contribué à ces travaux. L’ADMDPH regrette toutefois l’absence de l’Inspection générale des Affaires Sanitaires dans cette mission et souhaite que les travaux puissent être partagés le plus largement possible.
Plusieurs directrices et directeurs de MDPH ont ainsi fait part à la mission des problématiques suivantes :
- Une exemption unilatérale de l’Éducation Nationale du respect du cadre légal des mises à dispositions de personnels aux MDPH depuis près de 15 ans et des effectifs insuffisants dans les MDPH rendant l’équité de traitement sur le territoire impossible à réaliser ;
- Un régime indemnitaire des enseignants dans les MDPH très opaque et inégal qui ne favorise pas l’attractivité des métiers dans les MDPH au détriment des enfants et des familles qui attendent des réponses ;
- Des dispositifs de droit commun prévus pour le parcours d’élèves en difficulté mais insuffisamment mobilisés (PPRE et PAP notamment) conduisant à une systématisation voire à une banalisation du dépôt de demandes auprès des MDPH. Quand bien même ces outils seraient formalisés, force est de constater qu’ils sont souvent balayés avant leur mise en application ou avant évaluation de leur plus-value pour basculer dans un PPS, seul moyen d’obtenir une AESH mais surtout du matériel pédagogique adapté. Les futurs accès limités du Livret Parcours Inclusif aux équipes de MDPH n’amélioreront pas ce constat ;
- La demande d’aide humaine doit être accompagnée, expliquée aux familles et fortement portée par tous types de professionnels (enseignants, associations, professionnels intervenant auprès de l’enfant). A ce jour, la demande d’aide humaine individuelle soutenue par le terrain est parfois difficile à apprécier et à évaluer équitablement faute d’harmonisation nationale sur le volume horaire des aides humaines mutualisés et d’arbre décisionnel clair et opposable ;
- Les Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés (PIAL), censés permettre la fluidité de l’attribution de l’aide humaine, ne sont pas en capacité de faire face. Il persiste dans les territoires une désorganisation et absence de régulation après deux ans de mise en œuvre ;
- Le statut des AESH, insuffisamment formés et rémunérés pour accompagner les élèves, induit un recours à des associations engendrant, dans certains cas, un reste à charge conséquent pour les familles ;
- Les élèves orientés et affectés en ULIS bénéficient de temps d’inclusion parfois conséquents auxquels l’AESH mutualisé ne peut répondre seul. Le calibrage et l’organisation des ULIS se doivent d’être revus, harmonisés et renforcés ;
- Les AESH et les enseignants portent in fine souvent seuls une responsabilité d’effectivité de l’inclusion scolaire. Or, cet objectif ne peut pas reposer uniquement sur ces personnels. De plus, les AESH ont souvent l’impression de devoir répondre aux attentes des enseignants sur l’adaptation pédagogique nécessaire à l’enfant sans avoir les moyens d’y faire face ;
- La problématique des orientations alternatives non existantes ou non mises en œuvre reste entière alors que les familles ont de plus en plus de mal à obtenir la mise en œuvre de l’orientation cible. Cette absence de régulation qui s’ajuste au gré des discussions entre les partenaires de l’école inclusive engendre à nouveau de fortes inégalités territoriales.
Il existe à peu près autant de départements que de configurations de coopération : l’harmonisation des pratiques et du cadre des échanges sont fondamentales pour organiser les rentrées et trouver des solutions pour les enfants qui n’en n’ont pas.
La rentrée ne pourra pas s’effectuer sans qu’une concertation soit enfin lancée dans de bonnes conditions entre les MDPH, les familles, les associations, l’Éducation Nationale, la CNSA, la DGESCO et les ministères concernés pour aborder ces problématiques et proposer des réponses cohérentes.
En perspective, des chantiers sont à travailler, l’ADMDPH est tout à fait disposée à coopérer et pense qu’il y a urgence à le faire.
La réussite de la prochaine rentrée scolaire pour les enfants et leur famille en dépend.