Dans cette Lettre CIPES et les suivantes, nous proposons un récit d’exclusion issu de la journée de rencontre entre militants et militantes du 31 mars 2023.
Récit de Militant.e.s
Émilie, Militante Quart Monde. 1er Avril 2023.
Cette jeune militante témoigne de sa souffrance d’élève tout au long de sa scolarité. Dès l’école primaire, elle a subi des moqueries, des humiliations de la part des enseignants « tu vois, tu as encore insuffisant, t’es nulle, tu n’apprends pas », repris ensuite par les élèves. « Tu ne sais rien faire, t’es nulle ». Mise au fond de la classe, elle s’est réfugiée dans le silence, même quand elle ne comprenait pas, elle ne pouvait pas l’exprimer (« je ne disais pas un mot, même si je n’y arrivais pas, je ne le disais pas »). Elle se souvient du système mis en place pour son travail scolaire ; à l’écart du reste de la classe, elle avait des pochettes avec des exercices « plus faciles » que pour les autres et souvent des dessins. On l’a fait passer de classe en classe (« toutes les classes, je les ai sautées ») sans lui permettre d’apprendre, « j’ai seulement appris un peu plus tard en formation. ».
Rencontre CIPES du 31 mars et 1er avril 2023.
Le vendredi, l’équipe de coordination a réuni sept militants et militantes Quart Monde pour une journée de réflexion sur l’exclusion dans un cadre scolaire. Ils et elles ont présenté des récits de situations d’exclusion (mise à l’écart et mise en retrait) ayant marqué leur parcours scolaire ou celui de leurs enfants et petits-enfants. À partir de ces récits, riches en émotions et en informations sur le rôle de l’école, s’est déroulé un travail d’analyse des processus d’exclusion et de leurs conséquences sur le parcours scolaire et de vie. La journée s’est achevée par un travail préparatoire pour la présentation de certains de ces récits en introduction à la journée du lendemain.
Le samedi, une soixantaine de personnes impliquées dans le projet étaient réunies au siège d’ATD Quart Monde à Montreuil. Cela concernait des militant.es Quart Monde, des enseignant.es des écoles engagées, des membres du COPIL, des chercheur.es, des membres de l’AGSAS et l’équipe de coordination.
La journée a débuté par l’exposition des récits de mise à l’écart et/ou de mise en retrait préparés la veille.
Les participant·es se sont ensuite répartis en sept groupes afin de travailler sur trois objets :
– Les étonnements, les réactions aux récits ;
– La proposition de récits vécus dans un cadre professionnel ou personnel, par les membres de l’atelier, et faisant écho aux situations présentées ;
– L’identification des situations d’exclusion qui seraient spécifiques de la grande pauvreté.
Des retours des différents ateliers, nous pouvons relever l’attention portée aux paroles des un·es et des autres. Nous pouvons aussi souligner les étonnements et les inquiétudes que les récits ont suscités, la dénonciation des violences rapportées et des préjugés qui traversent l’espace de l’école. D’autant que, comme le disait un militant, « ils sont peut-être les mêmes dans le soin, la justice, etc. ».
Il s’est finalement révélé difficile d’identifier des exclusions qui ne toucheraient que des enfants en situation de grande pauvreté ou précarité.
Certains aspects sont cependant apparus pour questionner cette thématique :
- Les dimensions matérielles de la pauvreté et les conséquences directes sur la scolarité à travers notamment l’ensemble des activités scolaires qui exigent une participation financière des familles (pique-niques, déguisements, voyages, …).
- La question de la stigmatisation, au travers notamment du regard des adultes du système scolaire mais aussi de celui des pairs. Consciente ou non, elle peut se traduire par différents actes et paroles, dont le degré de violence peut être ressenti de manière plus ou moins importante.
- Le rôle du système scolaire et des institutions dans les exclusions et leurs impacts multiples à différents niveaux.
- La temporalité des exclusions, avec une caractéristique des exclusions spécifiques des élèves issus de milieux défavorisés, notamment au sein des classes : leur ancrage dans la durée.
Les réunions CIPES
AGSAS – 9 mai : Une rencontre avec l’AGSAS et l’équipe de coordination s’est tenue le 9 mai 2023. L’objectif de cette réunion était triple : d’une part de permettre aux nouveaux membres de l’équipe de coordination et aux membres de l’AGSAS de se rencontrer ; d’autre part de faire un point sur le suivi des écoles par les membres de cette association partenaire d’ATD Quart Monde et d’expliciter le fonctionnement avec les équipes éducatives ; enfin, de redéfinir les objectifs communs dans le processus d’accompagnement des équipes éducatives.
Équipes enseignantes – 11 mai : Cette rencontre a regroupé des enseignantes d’écoles participant à la recherche. L’objectif était d’échanger sur trois récits concernant des exclusions d’élèves que des enseignants et enseignantes ont rencontré dans leur parcours professionnel. Dans un premier temps, elles se sont interrogées sur les éléments nécessaires à la bonne compréhension de chaque situation. Puis des hypothèses ont été avancées sur les manières d’agir en tant que professionnel.le dans ces circonstances.